Emotions voyage plongée Maldives : Iles et eaux

Même si l’état d’esprit compte plus que le lieu où l’on se trouve, le lieu influence tout de même cet état d’esprit. Je savoure donc le temps qui coule. Ici, le regard s’évade à l’horizon et de multiples images me reviennent en vrac : les trois napoléons de Cocoa Thila dans le courant, ce banc de fusiliers, la pastenague curieuse d’Eboodhoo, ce gros perroquet balourd tournoyant parmi les coraux de Rengali. A Guraidhoo, dans la passe, les nombreux requins pointes blanches se moquent du fort courant. Deux raies aigles frôlent Thomas, mon binôme attentionné, tandis que je tente d’approcher des barracudas immobiles dans l’attente d’une proie potentielle. Perdu dans l’immensité marine de l’océan Indien, apparaissent à la surface une multitude d’auréoles turquoises. Les Maldives sont le pays de l’eau !
Les yeux s’imprègnent alors d’une palette de couleurs à l’inten

Ces heures sont autant de prétextes à s’imprégner profondément de l’horizon à 360 degrés, de ce disque monotone tout autour de soi, de ces nouvelles lumières. On ne voyage plus ici dans l’unique intention d’envoyer des cartes postales, pourtant appétissantes. La plongée met en évidence la beauté de la nature, l’interrogation sur le sens de la vie et l’envie d’aventure qui existe en chacun d’entre nous. Il suffit pour cela de se placer au milieu d’un tombant où, les palmes dans le bleu et le nez dans le courant, il est possible de surfer sur quelques vagues océaniques. Certains ont besoin de contact direct avec les éléments. D’autres se complaisent dans un profond voyage intérieur. En ce qui me concerne, je me satisfais des deux et un banc de carangues, un vol de raies aigles, quelques requins ou une tortue accentue mes états d’âme et prolongent mon inspiration. J’essaie dorénavant de ne plus frôler l’essentiel sans le savourer. La force d’une vie, au cours des ans, a modifié mon moi. Je ne voudrais plus passer devant une île sans l’admirer.
Et, cet archipel du bout du monde m’aide en cela. Ne rien faire entre deux immersions, les yeux dans le vide et les pensées encore dans l’eau. Il suffirait de quelques ondes paisibles pour me transformer en plancton. Que ces bonheurs ne deviennent jamais invisibles ! Je cherche souvent, en vain, les quelques rares créations humaines qui peuvent rivaliser avec l’authenticité des beautés naturelles. Attentif, j’écoute la voie du vaste océan et, fort de mon passé, j’entame une discussion avec le monde entier jusqu’à ce que l’équipage du «Haveyli» vienne me distraire en dansant au rythme de trois tambours. Le mouvement lascif de leur corps semble être une offrande à la nuit. Une belle leçon de spontanéité. Comme ce beau matin à Kudalah Thila, quand un ballet de lutjans jaunes autour de Carole a vite été rejoint par une tortue superstar. Où cette journée quand les crevettes bleu transparent ont décidé de nettoyer toutes les bouches des mérous. Ou encore cette soirée quand, autour d’un feu de bois sur l’île Meerufenshi, les langues se délient. C’est un moment propice aux confidences. Pascale me parle de son passé, de son futur poisson albinos. Jean-Louis, spécialiste en bonsaïs, m’apprend que les cocotiers possèdent toujours trente-trois feuilles et que la vie de celles-ci dure cinq années.
Mais c’est tout de même le requin baleine de Panetone Reef qui m’a le plus émoustillé : sept mètres de force tranquille à mes côtés. Même pas peur et que du bonheur ! Au milieu d’un océan, il est aisé de voyager pour soi, parce qu’on éprouve le besoin de découvrir, apprendre, penser et ouvrir le monde à soi. Le temps qui s’égrène permet le déploiement des cinq sens. Au son des flots fendus par l’étrave, je m’enivre pleinement de cette musique car dès mon retour, une infinité de voyages intérieurs m’attend et prolongeront, pour toujours cette escapade au pays de l’eau.
Henri Eskenazi
www.henrieskenazi.com
© Tout droit de reproduction réservé - Texte et photo H. Eskenazi
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